lundi 31 mars 2008

Hanami soit qui mal y pense

Devant le consensus béat qui se fait pour la floraison des cerisiers au Japon, je vais devoir, et je m'en excuse, apporter un peu de brutalité dans un monde de poètes pour nuancer quelque peu l’engouement général.
Alors certes, j'admets que les fleurs de cerisiers sont très jolies, et je conçois aisément que leur brièveté puisse renvoyer symboliquement à toutes les choses éphémères de la vie, et la vie elle-même d’ailleurs. Mais il ne faudrait pas s’imaginer pour autant que le hanami, le moment où l’on est censé regarder ces fleurs, est une fête tout empreinte de poésie dont le côté contemplatif incite à de profondes pensées philosophiques.

Non, car c’est surtout un vil prétexte pour se goinfrer et se livrer à des libations exagérées. Car ce que les Japonais apprécient le plus dans cette fête, c’est bien le pique-nique qui va avec. Cela peut même donner lieu à quelques débordements, notamment pour obtenir une place où installer sa toile en plastique qui délimitera l’aire que l’on s’attribue pour ledit pique-nique. Si quelques altercations ont parfois lieu, il y en a aussi qui préfèrent les éviter, et ainsi, dans les endroits les plus prisés, une organisation toute nipponne est établie et les lieux doivent être réservés à l’avance, délimités par des cordes assorties d’un petit panneau indiquant noms et horaires. Mais que ce soit un peu tendu ou tout à fait cordial, le résultat est le même: il y a une surpopulation terrible sous les cerisiers.

Une fois sa place conquise, on peut procéder aux opérations. D’abord, on sort la nourriture: les bento (boîte repas), les onigiri (boulettes de riz) et les snacks les plus variés, les fabricants de chips rivalisant d’inventions pour sortir la variété spécial hanami la plus appréciée. Les plus organisés amènent carrément le barbecue et se vengent d’avoir à manger des mets carbonisés en enfumant tout le voisinage. Vient ensuite la boisson: les cartons de bière ou produits houblonnés sont éventrés en larges quantités, les bouteilles de saké sont ouvertes, et il s’agit le plus souvent d’isshobin, c’est-à-dire des bouteilles d’un litre huit.
Accessoirement, on sirote aussi d’autres alcools, locaux ou pas. Si l’absorption de toutes ces boissons ne rend pas assez bruyant, on peut aussi amener de quoi casser les oreilles de l’entourage avec plus d’efficacité: instruments de musique, sono, machine à karaoké… Au final, si l’ambiance n’a absolument rien de zen, elle n’est cependant pas sans rappeler celles qui règne dans les plus grands centres commerciaux les jours de soldes.

La période durant laquelle on peut faire hanami est donc extrêmement courte, et si les conditions
météorologiques ne sont pas au rendez-vous, on en est quitte pour attendre l’année prochaine. Et il faut donc à nouveau supporter les cerisiers pendant un an. Car quand ces arbres ne sont pas couverts de fleurs, ils présentent de nombreux inconvénients. Il suinte de leur écorce lépreuse une espèce de sève aussi malodorante que collante qui ruine les vêtements sur laquelle elle a le malheur de s’accrocher, et attire toutes sortes d’insectes. Les feuilles sont pour leur part dévorées par des chenilles, et si l’ombre des cerisiers est appréciable lors de hanami, durant le reste de l’année, et particulièrement l’été, ce sont des endroits à éviter absolument.


Les Japonais persistent pourtant à vouloir en planter dans les écoles, si bien que les malheureux écoliers en subissent tous les désagréments, sans même profiter de leur bref moment de beauté, car ils sont en vacances lors de la floraison. Et pire encore, ces cerisiers ne donnent comme fruits que des guignes aigres, présentant la particularité de n’avoir que la peau sur le noyau. Elles ne sont donc absolument pas comestibles, et d’ailleurs, même les oiseaux les dédaignent. Elles finissent par pourrir sur l’arbre, attirant encore plus d’insectes grouillants.

Anciens commentaires:


Laissé par : Jérôme le04/04/2008 à 23h54

  • C'est vrai ça pourquoi pas un bon platane-mi ou marronier-mi!
  • Ça se fait pour les érables japonais, les momiji dont on contemple les feuilles rouges en automne. On en reparla sûrement plus longuement ici-même quand ce sera la saison.

  • Laissé par : Baiya le04/04/2008 à 07h19
    • Hum, bel esprit critique français... ;) mais c'est vrai (comme le disait une amie dans un commentaire sur mon blog) que c'est un peu exagéré quelquefois ce besoin de "faire" hanami.

lundi 24 mars 2008

D'égouts et des couleurs

Au Japon, on ne passe pas sur les plaques d’égout sans daigner les remarquer. En effet, elles sont ornées de dessins ou de motifs qui les agrémentent joliment. Dans certaines villes, on en trouve même en couleurs. Mais le mieux que l’on puisse admirer à Nagoya est la bichromie. Est-ce parce que la ville est peu touristique ou est-ce à mettre en rapport avec sa réputation de radinerie? Quoi qu’il en soit, si les plaques locales sont chiches en couleurs, elles n’en restent pas moins variées. Voici donc un petit aperçu de celles que l’on peut trouver.

Note: les photos ont été mises à jour lors du déménagement du blogue. Elles comportent une petite règle de bambou de vingt centimètres qui permettra d'avoir une meilleure idée de la taille des plaques.


Les plaques d’égout proprement dites (si j’ose dire) sont rondes et la plus emblématique est décorée d’un gerris avec la mention Nagoya en lettres latines. Certaines plaques portent la mention «en cas de tremblement de terre». Cela indique la présence d'un robinet à l'intérieur, qui peut être très utiles si les autres canalisations ont été rendues inutilisables.

Il y a ensuite celle qui présente dans des petits cercles divers lieux célèbres de la ville: le port, le sanctuaire d’Atsuta, le château et la tour de Nagoya, le zoo et… mystère pour le cinquième, dont le dessin semble évoquer une usine. La pastille centrale est ornée de l’idéogramme «huit», symbole de la préfecture d’Aichi, dont les deux traits sont ici deux oiseaux stylisés, ou le château de Nagoya. Elle porte la mention, encore en lettres latines, de Nagoya gesuidou, ce qui signifie «égouts de Nagoya». Il y a un petit N censé être au Nord, mais il ne vaut mieux pas s’y fier, la direction n’étant pas toujours rigoureusement indiquée.

La plaque «standard» paraît plus simple, mais elle reste néanmoins assez décorative.

Une plaque plus petite porte une mention en idéogrammes qui, si j’ai bien compris, indique la présence d’une valve. Strictement utilitaire, elle se passe donc de décorations superflues.



Les plaques rectangulaires entourées d’une bande jaune sont les bouches d’incendie réservées aux pompiers. La plus simple porte la mention «bouche d’incendie» en idéogrammes sur un fond grillagé. On y retrouve le symbole de la préfecture d’Aichi.


Les variantes sont plus attrayantes, l’une avec deux sachi, les dauphins symboles de la ville (dont les modèles sont sur le toit du château), et l’autre avec un seul sachi et le château, justement.









La compagnie du gaz a également ses plaques, dont une avec les sachi. Pour l'autre, hormis le logo au milieu, j’avoue que je n’ai pas très bien saisi ce que le dessin représentait. Mais vu les inclinations artistiques présentes sur ces objets, on est en droit de penser que l’art abstrait peut aussi y trouver place. 










La compagnie d’électricité préfère les motifs, que ce soit sur les plaques rondes ou carrées. Ce sont celles dont les dimensions sont les plus grandes.









Anciens commentaires

Il faut bien avouer qu'elles ont une certaine classe comparé à nos vilaines plaques uniformes...
Commentaire n°1 posté par Alex le 27/03/2008 à 09h59

Belle collection..je n'en ai que deux ou trois dans le billet sur mon quartier 
Bonne continuation!
 
Commentaire n°2 posté par Baiya le 04/04/2008 à 07h15