dimanche 27 avril 2008

Quelques statues de Nagoya (1)

Les Japonais aiment les statues et n'hésitent pas à les utiliser pour décorer leurs villes. On en trouve donc disséminées un peu partout, et pas forcément dans les endroits où l'on s'attendrait à en voir. Et Nagoya, malgré sa réputation de radinerie, ne fait pas exception à la règle. Si quelques personnages célèbres ont droit à leur représentation figée dans le métal ou la pierre, les thèmes les plus généralement abordés sont les animaux et les jeunes femmes. Faut-il voir dans ce rapprochement la manifestation du machisme nippon? Restons prudents: les français critiquent volontiers, et certes à raison, les japonais sur ce point-là. Mais il y a souvent derrière ce qui peut sembler une juste indignation, une volonté plus ou moins consciente de focaliser l'attention sur un peuple étranger pour précisément masquer les manifestations de ce même défaut chez nous. Je me garderai donc d'interpréter ce fait, mais que les analystes ayant une théorie digne d'intérêt à ce sujet n'hésitent pas à l'exposer dans les commentaires.

Et voici donc, pour cette première partie, quelques statues animalières visibles à Nagoya.

Les deux premières sont typiquement japonaises. En effet, à l'instar de notre coq gaulois, la grue est l'oiseau emblème du Japon. Elle symbolise également la longévité, et c'est là que la tortue entre en scène, car elle partage la même tâche, et c'est pourquoi ces deux animaux sont souvent associés, que ce soit dans des représentations visuelles ou dans des chants traditionnels. Ajoutons que la photo a été prise au parc de Tsurumai (鶴舞), nom dans lequel tsuru () est écrit avec l'idéogramme signifiant précisément grue, et que les statues sont placées au milieu d'une mare dans laquelle il y a beaucoup de tortues. Certes, des tortues américaines, celles que l'on vend toutes petites pour des aquariums et que leurs possesseurs viennent abandonner dans cette mare quand elles deviennent trop grosses.

C'est dans ce même parc de Tsurumai, bien cachée à l'ombre de quelques arbres, que se trouve une curieuse statue de la Colombe de la Paix. Alors que l'on s'attendrait à un oiseau fin et élégant, voire empreint d'une certaine fragilité, l'allure générale de cette statue est pour le moins curieuse, pour ne pas dire paradoxale. Avec une forme quelque peu trapue et une attitude plutôt inhabituelle, ailes déployées et tête tournée sur le côté, elle rappellerait plutôt un de ces fiers aigles conquérants dont se sont dotés et dotent encore divers pays animés, à un degré plus ou moins grand, d'intentions expansionnistes et parfois franchement belliqueuses.

Le lion est un sujet qui revient fréquemment, car de nombreux immeubles et résidences y sont associés, pour une raison qui demeure mystérieuse, les lions étant plus enclins à apprécier les grands espaces des savanes qu'à s'enfermer dans des clapiers. Mais l'animal étant presque toujours représenté allongé, on peut raisonnablement penser qu'il évoque le repos du guerrier, donnant au salary-man nippon rentrant chez lui l'image flatteuse d'un grand prédateur. Encore que celui dont vous admirez la photo se trouve devant un grand magasin. Allez comprendre…

Voici maintenant une statue équestre originale, car à la gloire du cheval, et non pas de l'individu qui le monte. A moins qu'il ne s'agisse d'une représentation quelque peu détournée d'une glorification de je ne sais quel idéal familial, puisque nous avons semble-t-il le cheval accompagné d'une jument et d'un poulain. Ne négligeons pas non plus une explication beaucoup plus simple: de nombreux japonais apprécient les courses de chevaux.


Les statues ne font pas que représenter des animaux en général. Celle-ci est un hommage à une chienne particulière nommée サーブ (Sabu). Il s'agit d'une chienne-guide, tâche qui mérite déjà largement qu'on lui rende des honneurs. Mais cette brave bête a de surcroît héroïquement sauvé son maître d'un accident de la circulation, perdant une patte dans l'action. Ce qui ne l'a pas empêchée de continuer à le guider par la suite. La statue était à l'origine à la gare de Nagoya. Mais cette dernière a connu de gros travaux de transformation et les anciens bâtiments ont été démolis. La statue a donc été déplacée et se trouve maintenant à Sakae, quartier au centre de Nagoya.

Pour finir, voici une statue moderne malgré le sujet préhistorique. C'est une statue végétale, mais plutôt que de tailler un arbuste en une forme compliquée, on laisse une plante grimpante occuper une structure métallique qui donne la forme à l'ensemble, ici en l'occurrence celle d'un magnifique Parasaurolophus.

à suivre…

Anciens commentaires

je m'eclate avec tes elucubrations!!!
Merci pour les petits mysteres du Japon...un jour peut-etre sera pour le visiter!!!

La petite (pas vraiment petite maintenant) peste
Commentaire n°1 posté par tania le 26/04/2008 à 22h41
AH..................dans mes mes projets de futurs billets se trouvait justement ce sujet!!!!!!!!!!!!!!!!!!!!! en particulier les statues (ou plutôt statuettes...) qui décorent l'avenue allant de la gare de Nagoya à Sakae.
Mais comme je ne connaissais pas la plupart de celles présentées aujourd'hui, merci quand même :)
Commentaire n°2 posté par Baiya le 28/04/2008 à 04h39
Vu la quantité de statues qu'il y a à Nagoya, il y a matière à plusieurs billets. Mon prochain sera consacré à des statues de Sakae, Imaike et du parc de Tsurumai. Donc n'hésite pas à nous parler de celles qui se trouvent entre Sakae et la gare, j'ai hâte de lire et voir ça.
Réponse de Fabrice Chotin le 28/04/2008 à 05h12
Wow, tu as trouve beaucoup de statues a Nagoya, magnifique !!!
Le parc s'appele "Tsuruma" etait le zoo. C'est pour ca qu'il y a pas mal de animaux ???
Commentaire n°3 posté par yukari le 05/06/2008 à 14h23

lundi 21 avril 2008

Quinze coups de griffes

Quinze coups de griffes est la nouvelle anthologie du GR746, nom de code assez peu évocateur, mais non empreint d'un certain mystère, du groupe SFFF des écrivains auto-publiés de Lulu, au nombre desquels vous trouverez votre humble serviteur. Nous avons décidé cette fois-ci de nous intéresser aux chats.

Comme toujours, vous pouvez soit télécharger le PDF gratuitement, ou si vous êtes un inconditionnel du papier, commander le livre chez Lulu, le tout sur cette page.



Au sommaire:

  • Le châtiment du chat qui ment Christiane Toine
  • Mission Zibeon Macha Sener & Stéphane Thomas
  • Luna Sylvie Parthenay
  • Patchouka Ornella de Saint Germain
  • Mission Black Cat Yann Alidor
  • Six Six Six Stein
  • Le neuf de coeur  Adam Joffrain
  • Le Miki Nicolas Chapperon
  • J’y crois pas! Michèle Desmet
  • Belair et la chanson triste Jacqk
  • Les Veilleurs Fred Vasseur
  • Un chat de jade blanc Guillaume Roos
  • As Dlan Claude Roux
  • À bon chat bon rêve Fabrice Chotin
  • Le massacre d’Albert Croyant Eleken Traski

lundi 14 avril 2008

Un peu de franponais

Au Japon, nombreux sont ceux qui désirent, pour un produit, un nom de magasin ou de bâtiment, se donner une touche de chic. Notre pays bénéficiant toujours d'une réputation d'élégance et de raffinement, une solution simple consiste donc à utiliser notre langue pour s'attribuer les mérites supposés de la culture à laquelle elle est attachée, sans compter qu'elle apporte un petit parfum d'exotisme non négligeable.

Mais le problème, c'est que les francophones ne sont guère nombreux, malgré les efforts de tous ceux qui, comme votre serviteur, s'ingénient à enseigner notre langue dans ce pays. Et on n'a pas toujours recours à leurs service pour écrire en français. Le terme de franponais a donc été créé pour désigner ce français utilisé par les japonais à but décoratif ou lucratif. Vous en trouverez de nombreux exemples sur la Toile, et je contribue donc modestement à l'effort de collecte par le présent article, avec des exemples photographiés à Nagoya.

Certains utilisent judicieusement notre langue, en respectant son orthographe, sa grammaire et le sens des mots. Mais ces cas sont les moins intéressants, et je n'en rapporterai donc pas. Je tiens néanmoins à signaler leur existence pour ne pas laisser imaginer que les japonais ourdiraient une sorte de vil complot visant à une quelconque déstructuration du français.

Voici un exemple où l'orthographe et la grammaire sont correctes, mais où il y a visiblement eu une incompréhension quelque part:
«La boutique de l'adulte qui comprend une différence».
Le résultat ne manque néanmoins pas d'un certain charme surréaliste. Plus prosaïquement, on peut soupçonner l'utilisation d'un logiciel de traduction, lesquels ne sont pas encore très au point.






C'est peut-être là l'utilisation d'un dictionnaire qu'il faut blâmer. En effet, certains sont trop prudes pour donner toutes les définitions possibles d'un même mot. Ce qui peut avoir des résultats assez amusants . Cet aromathérapiste illustre tout à fait le problème.





Ce nom paraît anodin, voire mignon, mais sachant qu'il désigne un immeuble de petits appartements, l'évocation du clapier est inévitable.







Encore un lapin pour ce magasin de vêtements, mais cette fois-ci, c'est l'orthographe qui pose problème. Il faut savoir que le japonais transcrit indistinctement «in» et «an» par les katakanas  アン, qui sont eux-mêmes retranscrits en caractères latin par «an». C'est ainsi que mon nom de famille se retrouve être «shotan».




Pour résoudre le problème de l'orthographe, on peut aussi écrire le nom en japonais. Parmi les trois systèmes d'écriture du japonais, il y a justement les katakana qui sont utilisés pour retranscrire les mots d'origine étrangère. L'ennui, c'est que la prononciation en pâtit. Ainsi, cet immeuble nommé «maison soleil» devient «mezon soreiyu».


Si le cas précédent mentionnait encore le français en petit, il n'en est rien pour ce salon de beauté, et seuls ceux qui lisent les katakana pourront apprécier la référence parisienne, puisque qu'il s'agit de «ra seinu», autrement dit, «la Seine».




Enfin, voici le cas le plus extrême de japonification de notre langue, puisque le nom de ce salon de beauté est ici écrit en kanji, c'est-à-dire en idéogrammes. Ce sont les trois gros à droite:

Et ça se lit «juteimu», retranscription de «je t'aime».
Les kanji signifient: ju: arbre, végétation, tei: jardin, mu: rêve.
Anciens commentaires:

Laissé par : Baiya le21/04/2008 à 15h52
  • Le dernier...excellent! C'est fou la quantité d'endroits qui se sont appropriés 'La Seine': dans mon quartier, sur un café.

Laissé par : Alex le18/04/2008 à 10h39
  • Le dernier exemple est tout simplement superbe !
    Comment pouvaient-ils mieux imager un tel sentiment. :)
Laissé par : catherine Belkhodja le14/04/2008 à 13h40
  • Excellent article j'avais repere plusieurs enseignes dans ce genre c'est tres amusant ...
  • Il y a pas mal de sites sur le sujet avec toutes sortes d'exemples rigolos. Il suffit de taper "franponais" dans un moteur de recherche.